Au cœur de la pampa argentine, à environ 500 kilomètres de Buenos Aires, se trouve Villa Epecuén, sans doute la plus célèbre ville fantôme d’Argentine. Fondée dans les années 1920 au bord du Lago Epecuén, cette station thermale a prospéré grâce aux propriétés réputées curatives de ses eaux salées, comparables à celles de la mer Morte. Mais en 1985, son destin a basculé : une inondation a englouti entièrement la ville, la condamnant à un quart de siècle de silence sous les flots.
Paisaje después de la batalla par mujik estepario sous licence CC BY-NC-ND 2.0.
L’âge d’or d’une station thermale
Au début, Villa Epecuén a eu tout d’un petit paradis pour les curistes. Accessible par le train, elle a attiré des visiteurs venus de tout le pays pour se baigner dans ses eaux à forte salinité. Hôtels, restaurants et commerces ont animé la cité qui comptait environ 1 500 habitants permanents et recevait jusqu’à 20 000 touristes chaque été. Pour beaucoup, c’était l’endroit rêvé pour se ressourcer… avant que tout ne disparaisse.
El libro de la buena memoria par mujik estepario sous licence CC BY-NC-ND 2.0
Le jour où le lac a tout recouvert
La tragédie est arrivée après plusieurs années de pluies exceptionnelles. En 1978, un remblai avait été construit pour protéger la ville, mais le 10 novembre 1985, il a cédé. Le lac a débordé et a commencé à avaler méthodiquement les rues, les maisons et les arbres. En 1993, la ville fantôme d’Argentine avait totalement disparu, ensevelie sous près de dix mètres d’eau. Seuls les souvenirs des habitants rappelaient qu’une cité animée s’était trouvée là.
The night HDR par Carlos Larandaburu sous licence CC BY-NC-ND 2.0.
Villa Epecuén, une Atlantide argentine
Pendant vingt-cinq ans, Villa Epecuén est restée engloutie. Puis, à partir de 2009, le lac a commencé à se retirer, dévoilant peu à peu les ruines, à l’instar du cromlech de Guadalperal. Le paysage qui est réapparu avait quelque chose d’irréel : façades minéralisées, routes craquelées, arbres pétrifiés, le tout recouvert d’une fine croûte de sel. On a eu l’impression d’assister à une scène post-apocalyptique, une Atlantide version argentine.
Epecuén par Jose Carrizo sous licence CC BY 2.0.
Parmi les ruines, un seul habitant a repris place : Pablo Novak, né en 1930. Devenu malgré lui le dernier résident de la ville, il a accueilli les visiteurs et partagé ses souvenirs d’avant le désastre. Il expliquait:
Je suis bien ici. Je suis juste seul. J’ai lu le journal. Et je pense toujours à l’âge d’or des villes dans les années 1960 et 70
Sa mort en janvier 2024 a marqué la fin d’une époque : désormais, Villa Epecuén n’a plus aucun habitant.
Epecuén par Jose Carrizo sous licence CC BY 2.0
La poésie en noir et blanc des ruines
Si certains utilisent les lieux comme terrain de jeu en VTT, les ruines de cette ville fantôme d’Argentine ont inspiré de nombreux artistes et photographes. Le Norvégien Øystein Sture Aspelund leur a consacré une série en noir et blanc saisissante. En éliminant la couleur, il a mis en valeur les textures créées par le sel, les ombres sur les façades effondrées et les silhouettes fantomatiques des arbres morts. Ses images ont transformé la désolation en poésie visuelle et rappelé à quel point la beauté peut surgir du silence.
Voici quelques extraits de sa série dans cette ville ressurgie des flots:
Crédits photo Øystein Sture Aspelund (CC BY-NC-ND 4.0).
Crédits photo Øystein Sture Aspelund (CC BY-NC-ND 4.0).
Crédits photo Øystein Sture Aspelund (CC BY-NC-ND 4.0).
Crédits photo Øystein Sture Aspelund (CC BY-NC-ND 4.0).
Crédits photo Øystein Sture Aspelund (CC BY-NC-ND 4.0).
Crédits photo Øystein Sture Aspelund (CC BY-NC-ND 4.0).
Vidéo de Villa Epecuen
Peut-être le destin de Fabbriche di Careggine, ce village médiéval italien englouti qui devrait bientôt refaire surface aussi, voici une vidéo de cette ville qui est ressortie des eaux:
Infos pratiques pour visiter Villa Epecuén
La ville fantôme de Villa Epecuén se trouve dans la province de Buenos Aires, en Argentine, sur la rive orientale du Lago Epecuén. Elle dépend administrativement de la municipalité de Carhué, située à seulement 7 kilomètres.
• Depuis Buenos Aires : comptez environ 520 km par la route (7 à 8 heures de trajet en voiture ou bus). La route nationale RN 205 puis la RN 60 mènent jusqu’à Carhué.
• En bus : des compagnies locales assurent des liaisons régulières Buenos Aires → Carhué.
• En avion : l’aéroport le plus proche se trouve à Bahía Blanca (200 km), mais le trajet final se fait ensuite en voiture ou bus.
• Meilleure période : l’été austral (novembre à mars) offre un climat chaud et sec, mais l’automne et le printemps sont plus agréables pour se promener parmi les ruines sans chaleur excessive.
Une fois arrivé à Carhué, on peut facilement accéder aux ruines de Villa Epecuén en voiture ou même à vélo. Le site est en accès libre, mais certains circuits guidés sont proposés par l’office du tourisme local.
Conseil : prévoyez de bonnes chaussures, de l’eau et un appareil photo. La lumière rasante du matin ou du soir rend les ruines encore plus spectaculaires.
Ses coordonnées GPS sont: 37°07′44.7″ S, 62°48′19.6″ O (-37.129080444048846, -62.805446116427454).
Voici sa position sur Google Maps:
Epecuen 2018 – 4 par Carlos Larandaburu sous licence CC BY-NC-ND 2.0.
Sources pour aller plus loin
• Wikipédia
• The Independant
• The Atlantic
Site submergé, découvrez également le clocher du lac de Resia en Italie.
Retour de ping : Danny MacAskill en VTT Trial à Epecuen [video] ← 2Tout2Rien