Peut-on faire rêver avec du fer à béton ? Pour Tomohiro Inaba, la réponse est un grand oui – un oui aussi fin qu’un fil d’acier en apesanteur. Ce sculpteur japonais transforme la matière brute en visions éthérées, mêlant la rigueur du métal à la légèreté du dessin. Ses œuvres semblent littéralement se désintégrer sous nos yeux, comme si elles hésitaient entre réalité et imagination.
C’est ce qu’il appelle le “gradient to blank” : une transition visuelle du tangible vers l’invisible. Le corps de l’animal, du personnage ou de l’objet prend forme à partir de fils de fer torsadés, avant de se fondre en une explosion chaotique de lignes. Une sculpture en fer qui semble inachevée, ou en train de disparaître.
Good night 2 – 2020.
Des créatures entre deux mondes
Cerfs, chevaux, renards, figures humaines… Tomohiro Inaba peuple son bestiaire de silhouettes familières mais incomplètes. Chaque sculpture raconte une histoire – ou plutôt, suggère une émotion. Dans Hearing footsteps left by a star, un renard semble filer à travers l’espace, poursuivant une étoile disparue. Dans Good night no.2, un cheval presque fantomatique se tient près d’une jeune fille assise, dans un face-à-face suspendu hors du temps.
Ce flou volontaire, cette disparition partielle, invitent le spectateur à combler les vides. Comme dans un souvenir qui s’efface ou un rêve dont on ne se souvient que par bribes. Une approche qui rappelle les sculptures d’enfants dissous dans l’air de Lene Kilde.
Hearing footsteps left by a star – 2021.
Entre art contemporain et poésie métallique
Les sculptures de Tomohiro Inaba flirtent avec plusieurs registres : art contemporain japonais, sculpture en fil de fer (découvrez celles de Karen Akhikyan), dessin spatial, voire calligraphie 3D. Elles séduisent autant les amateurs d’architecture que les rêveurs du dimanche.
À travers ses créations, Inaba questionne la perception : où s’arrête l’objet ? Où commence l’imaginaire ? Et si l’essentiel, justement, était dans ce qui manque ?
When the world gazes – 2021.
L’artiste derrière le fil
Né en 1984 dans la préfecture de Tochigi (Japon), Tomohiro Inaba est diplômé de l’Université des Arts de Bunsei. Il développe très tôt une fascination pour la structure du métal et sa capacité à figurer à la fois la solidité et l’éphémère.
Il a été primé à l’international — notamment au Canada (Prix de la promotion culturelle japonaise), en Suisse (Franck Muller Genius of Creation), et a exposé dans de nombreuses galeries au Japon et en Europe. Son travail est aujourd’hui reconnu comme l’un des plus singuliers dans le paysage de la sculpture contemporaine en fer.
Sculptures de Tomohiro Inaba
Après les sculptures de personnes en désintégration de Regardt Van Der Meulen, voici quelques autres créations de Tomohiro Inaba:
Memory of the Comet no.17 – 2024.
Innocent Star – 2024.
River of Primitive Age – 2024.
Memory of the Stars – 2020.
Memory of the Comet no.10 – 2018.
Memory of the Comet no.6 – 2017.
Night Stranger – 2015.
Moon Chasers – 2015.
What Have You Found Out – 2015.
Toutes les photos: crédits Tomohiro Inaba.
Sources pour aller plus loin
• Site web
• Instagram
• Colossal
• Yukikomizutani
Morceaux manquants, découvrez également les sculptures en bronze déchiquetées de Bruno Catalano.