Derrière son pseudonyme énigmatique, Laura Makabresku (née en 1987 en Pologne) s’impose comme l’une des voix singulières de la photographie contemporaine. Ses images, entre poésie et malaise, rappellent autant des contes gothiques que des icônes religieuses revisitées. Deux séries marquantes, Sacrum Profanum et Adolescence, révèlent son talent pour explorer les zones grises de l’âme humaine : l’innocence et le désir, la lumière et l’ombre, la pureté et la chair.
Qui est Laura Makabresku ?
Photographe autodidacte, elle a su s’imposer en diffusant ses œuvres sur Behance, Instagram et dans des galeries européennes. Inspirée au début de sa carrière par les contes de fées (Andersen et autres frères Grimm), elle est désormais plutôt versée dans le spirituel et le religieux, mais verse aussi dans une sensibilité très contemporaine. Ses photos ne sont jamais de simples portraits : ce sont des récits condensés, des fragments de rêves, des visions suspendues. Makabresku se définit d’ailleurs volontiers comme une conteuse visuelle, davantage poétesse que technicienne.
Sacrum Profanum : le sacré et le profane
Dans cette série, l’artiste met en tension les symboles religieux et la fragilité des corps. Les croix, cierges et voiles se mêlent aux gestes intimes, parfois hésitants, parfois douloureux. La frontière entre le spirituel et le charnel devient poreuse, jusqu’à se dissoudre.
Visuellement, les photographies évoquent le clair-obscur des peintres baroques, mais revisité dans un langage moderne. Chaque image est comme un tableau qui nous pousse à réfléchir : où s’arrête l’élévation divine, où commence la tentation humaine ? Chez Makabresku, les deux semblent inséparables.
Adolescence : portrait d’une jeune femme en fleur
Autre moment fort de son œuvre, la série Adolescence quitte les symboles religieux pour se tourner vers un âge de transition : celui de l’éveil, fragile et incertain, entre enfance et féminité. La photographe saisit des postures timides, des regards baissés, des corps en devenir. La fleur, motif récurrent, devient métaphore de l’éclosion, tandis que les voiles qui recouvrent à moitié les silhouettes rappellent à la fois le secret, la pudeur et l’attente.
L’atmosphère y est douce, baignée d’une lumière diffuse qui gomme les contours et donne l’impression que ces portraits auraient pu être pris au XIXᵉ siècle, même si on reste loin des portraits de ses filles devant le miroir par Lady Clementina Hawarden. On pense aux peintres préraphaélites et à leurs jeunes héroïnes idéalisées, mais transposées dans une esthétique contemporaine, moins décorative, plus intime.
Un style hypnotique
Qu’il s’agisse de sacré ou d’adolescence, les constantes de son style apparaissent clairement. Sa palette est sombre et désaturée, comme passée par un voile de brume. Ses mises en scène s’appuient sur des symboles simples mais puissants, chaque geste et chaque objet semblant porteur d’un sens caché. Le temps lui-même paraît indécis : on ne sait jamais si l’on regarde une image d’hier ou d’aujourd’hui.
C’est cette ambiguïté qui fascine. Les photographies de Makabresku dérangent, mais elles séduisent aussi par leur beauté fragile. Elles nous obligent à ralentir, à contempler, à sentir ce qu’il y a de sacré dans le profane et de profane dans le sacré.
Sacrum/Profanum – le sacré et le profane par Laura Makabresku, en images:
(plus de ses photographies sur le site web de la photographe ici ou sur sa page behance là)
Une voix unique dans la photographie contemporaine
À l’heure où les réseaux sociaux inondent nos écrans d’images standardisées, l’œuvre de Laura Makabresku s’impose comme une exception. Ses séries forment un corpus cohérent, qui dialogue autant avec la peinture religieuse qu’avec la photographie symboliste. Elles posent toujours la même question : que cache-t-on, que révèle-t-on, dans l’intimité comme dans la foi ?
Makabresku n’illustre pas des réponses, elle les transforme en images à méditer. Ses photographies ne se consomment pas, elles se laissent habiter.
Pour aller plus loin
On peut retrouver son travail sur son portfolio Behance et suivre son actualité sur Instagram.
Toutes les images: crédits Laura Makabresku (CC BY-NC-ND 4.0).
Dans un autre style, découvrez également l’univers des frères Grimm en photo par Kilian Schoenberger.