Aller au contenu

Le pitohui à capuchon, le quasi seul oiseau toxique connu

Partager/Envoyer à une IA pour résumer :

Endémique de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le pitohui à capuchon ou pitohui bicolore (Pitohui dichrous) est quasiment seul oiseau toxique connu, sa toxicité n’ayant été découverte par les scientifiques il n’y a qu’une trentaine d’années.

C’est l’un des très rares oiseaux au monde dont les tissus contiennent une toxine dangereuse pour l’homme. Si le peuple mélanésien sait depuis longtemps qu’il ne faut pas toucher à cet oiseau toxique, l’ornithologue Jack Dumbacher l’a découvert à ses dépends.

Le-pitohui-a-capuchon-pitohui-bicolore-le-quasi-seul-oiseau-toxique-venimeux-1
Hooded Pitohui 1 par Benjamin Freeman ( CC BY 4.0 ).

La toxicité du pitohui bicolore découverte par hasard

A la recherche d’oiseaux paradis (voir la magnifique danse nuptiale du paradisier superbe) sur une île en 1990, il a attrapé par hasard dans ses filets des oiseaux pitohuis bicolores qu’il a extrait à la main.

En les sortant du piège, les oiseaux se sont débattus et le scientifique a reçu quelques coups de bec et de griffes sur les mains. Instinctivement, il a porté ses mains à la bouche pour apaiser la douleur. Presque immédiatement, Dumbacher a senti ses lèvres et sa langue s’engourdir puis commencer à brûler, et ce pendant des heures, une expérience qu’il a comparé à la piqûre d’une pile de 9 volts.

Soupçonnant que les symptômes étaient causés par les oiseaux, il a pris plus tard une plume de pitohui à capuchon et l’a mise dans à la bouche. L’engourdissement et la douleur revinrent alors rapidement.

Le-pitohui-a-capuchon-pitohui-bicolore-le-quasi-seul-oiseau-toxique-venimeux-2


Hooded Pitohui 4 par Benjamin Freeman ( CC BY 4.0 ).

Jack Dumbacher a interrogé les indigènes de Nouvelle-Guinée sur le pitohui bicolore et tous semblaient tous connaître sa toxicité. Ils le surnomment « oiseau poubelle », car il dégage une odeur nauséabonde lorsqu’il est cuit et n’est consommé qu’en dernier recours, quand rien d’autre de comestible n’est disponible.

Désireux d’en savoir plus sur les pitohuis et leur poison, Jack Dumbacher a envoyé des plumes à John W. Daly du National Institutes of Health, le plus grand scientifique mondial à l’époque sur les toxines naturelles. Au cours des années 1960, cet expert a identifié la batrachotoxine comme étant la toxine des grenouilles venimeuses de Colombie et, par chance, il a découvert la même famille de toxines dans les plumes de cet oiseau toxique.

Le-pitohui-a-capuchon-pitohui-bicolore-le-quasi-seul-oiseau-toxique-venimeux-3
Hooded Pitohui Pitohui dichrous par Nik Borrow (CC BY-NC 2.0).

Les composés connus sous le nom de batrachotoxines (BTX) sont des alcaloïdes stéroïdiens neurotoxiques qui agissent en interrompant le flux d’ions sodium à travers les canaux des membranes nerveuses et musculaires, provoquant un engourdissement et une sensation de brûlure à faible concentration, et une paralysie, suivie d’un arrêt cardiaque et de la mort, à des concentrations plus élevées.

À titre de comparaison, la dose létale médiane (DL50) de la batrachotoxine chez les souris est d’environ 2 μg/kg, ce qui en fait l’une des molécules naturelles les plus létales connues.

Ils sont reconnus parmi les composés les plus toxiques de la nature (250 fois plus toxiques que la strychnine) et sont également secrétés par des grenouilles d’Amérique du sud qui font parti des plus toxiques au monde.

Des recherches ultérieures ont montré que les pitohuis à capuchon stockaient les toxines à la fois dans leur peau et leurs plumes, mais aussi dans leurs os et leurs organes internes, bien qu’à des concentrations nettement plus faibles. Trouver ce poison dans le système interne de l’oiseau suggère qu’il y est insensible.

On ignore toujours par quel mécanisme l’oiseau neutralise les effets de la toxine, ce qui en fait un sujet d’étude intrigant pour les biologistes.

Etrangement, la concentration de batrachotoxine varie considérablement d’un pitohui à capuchon à l’autre, ainsi que géographiquement. Cela suggère que la disponibilité de proies toxiques dans leur environnement immédiat joue un rôle central.

Le pitohui à capuchon, oiseau toxique par son alimentation

L’origine de toxine chez les pitohuis à capuchon fait l’objet d’un débat parmi les scientifiques, mais le consensus général est qu’ils ne produisent pas le poison eux-mêmes mais l’obtiennent de leur alimentation, en particulier les coléoptères de la chorésine qui détiennent également cette toxine.

La raison de la présence de la toxine est toujours un peu mystérieuse. Si certains scientifiques estiment que c’est pour éloigner les prédateurs, cela reste toutefois assez peu probable. Le pitohui pouvant voler, à la différence d’autres animaux toxiques, sa première défense est la fuite. D’autre part, les concentrations sont bien plus faibles que chez les grenouilles venimeuses.

Peut être le pitohui, comme le lémurien avec les mille pattes venimeux, se drogue-t-il au coléoptère toxique?

L’explication la plus plausible est que la toxine sur leur peau et leurs plumes est utilisée pour éloigner les parasites. Des expériences ont montré que les poux avaient tendance à éviter les plumes toxiques de pitohui à capuchon, et ceux qui les infectaient vivaient moins longtemps que les poux témoins. Cependant, les batrachotoxines ne semblent pas avoir d’effet sur les parasites internes.

Si le pitohui à capuchon est un oiseau toxique avéré, il n’est pourtant peut être pas le seul. Un de ses cousins, le Pitohui variable (Pitohui kirhocephalus) ou même le Pitohui huppé et le Pitohui noir semblent partager également cette particularité à moindre échelle.

Ajoutons que d’autres espèces, comme l’Ifrita kowaldi (Ifrita à huppe bleue), présente également une toxicité avérée en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Cela pourrait indiquer que la toxicité chez les oiseaux de cette région est un phénomène plus répandu qu’on ne le pensait initialement.

Vidéo du pitohui à capuchon ou pitohui bicolore

Voici un petite vidéo sur la toxine de cet oiseau insolite, utilisant la chimie à l’instar de certaines chenilles mais pour des raisons différentes:


Sources pour aller plus loin

NIH – Batrachotoxin Reference
Wikipedia – Pitohui
eBird – Fiche du Pitohui à capuchon (Pitohui dichrous)
National Geographic – Pourquoi les animaux toxiques ne s’empoisonnent-ils pas eux-mêmes ?

Sans venin mais avec un super pouvoir, découvrez également le grèbe élégant et le grèbe à face blanche, les plus gros animaux capables de marcher sur l’eau.

Partager/Envoyer à une IA pour résumer :

2 commentaires sur “Le pitohui à capuchon, le quasi seul oiseau toxique connu”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *