Avec son museau proéminent en forme de trompe, son regard doux et ses cornes translucides, l’antilope Saïga ressemble davantage à un personnage échappé d’un bestiaire fantastique qu’à un mammifère bien réel. Et pourtant, cette espèce existe bel et bien depuis… l’ère glaciaire. Aujourd’hui, elle lutte pour sa survie dans les plaines d’Asie centrale où vivaient autrefois les mammouths et les rhinocéros laineux.
Crédit photo Yakov_Oskanov.
Un nez digne d’un filtre HEPA
Ce qui frappe en premier chez le Saïga tatarica, c’est son nez tubulaire et flexible, une adaptation évolutive très ingénieuse. Cette « trompe » sert à :
• Filtrer la poussière soulevée par les troupeaux dans les steppes arides,
• Réchauffer l’air glacial en hiver,
• Rafraîchir l’air brûlant en été.
Véritable adaptation climatique, ce museau agit comme un échangeur thermique naturel.
Cette caractéristique unique fait de la Saïga une antilope immédiatement reconnaissable et souvent qualifiée de “fossile vivant”.
Crédit photo Rostovdriver.
Habitat : les grandes plaines eurasiennes
Historiquement, la Saïga parcourait un immense territoire allant de la Grande-Bretagne à l’Alaska pendant la dernière période glaciaire. Aujourd’hui, elle ne survit plus que dans quelques régions du Kazakhstan, de Mongolie, de Russie et d’Ouzbékistan.
Elle affectionne les steppes ouvertes et les semi-déserts où elle forme des troupeaux migrateurs pouvant atteindre plusieurs milliers d’individus. Ces migrations saisonnières sont essentielles à sa survie, mais aussi très vulnérables aux obstacles humains (routes, clôtures, infrastructures pétrolières…).
À ce titre, elle a partagé un environnement à une époque avec d’autres créatures mythiques comme l’Elasmotherium, la “licorne” préhistorique, un cousin disparu des rhinocéros qui peuplait autrefois les mêmes plaines.
Crédit photo Rostovdriver.
Reproduction express
La Saïga est une sprinteuse de la maternité. Les femelles atteignent leur maturité sexuelle en un an à peine et donnent naissance à 1 ou 2 petits après une gestation éclair de 5 mois. Ce rythme rapide est une stratégie de survie typique des espèces soumises à de fortes pressions naturelles… et humaines.
A noter qu’il s’agit de la seule antilope eurasienne. Pour comparaison, certaines antilopes africaines, comme la gazelle de Waller, ou encore le grand koudou, ont des stratégies reproductives différentes, mieux adaptées à des milieux plus boisés et moins extrêmes.
Crédit photo Biodiversity Challenge Funds (CC BY-NC-SA 2.0).
Une espèce au bord de l’extinction
L’antilope Saïga a été décimée par plusieurs facteurs :
• Braconnage : ses cornes sont très prisées dans la médecine traditionnelle chinoise.
• Effondrement des populations après la chute de l’URSS (manque de régulation et explosion du braconnage notamment dans les années 1990).
• Maladies et épizooties : en 2015, une infection bactérienne (Pasteurella multocida) a décimé plus de 200 000 individus en quelques semaines, soit près des deux tiers de la population mondiale..
• Changement climatique : perturbation des cycles migratoires et des ressources naturelles.
Résultat : l’espèce est aujourd’hui classée « En danger critique d’extinction » par l’UICN.
Crédit photo Rostovdriver.
Des lueurs d’espoir pour l’antilope Saïga
Bonne nouvelle cependant : grâce à des efforts de conservation coordonnés (Kazakhstan, WWF, UICN), la population mondiale de Saïgas est passée de moins de 50 000 individus en 2016 à plus de 1,9 million en 2024. Cette remontée spectaculaire en fait un exemple rare de succès écologique.
Les mesures clés incluent la surveillance et protection renforcées, la création de zones protégées et la réduction du braconnage grâce à des programmes communautaires.
Crédit photo ndenisov.
Une icône de la steppe
L’antilope Saïga n’est pas seulement une curiosité zoologique : elle est un maillon essentiel de l’écosystème des steppes. Son pâturage aide à maintenir la biodiversité, à disséminer les graines et à structurer le paysage végétal.
Et si la Saïga vit dans les steppes eurasiennes, elle appartient à une famille très diversifiée : des espèces aussi singulières que le nyala d’Afrique australe ou la gazelle girafe illustrent l’incroyable plasticité évolutive des antilopes.
Crédit photo ndenisov.
Vidéo de l’antilope Saïga
Elle pourrait peut-être croiser la route du Manul, voici une petite vidéo de l’antilope Saïga, herbivore au museau en trompe:
Sources pour aller plus loin
• UICN Red List
• WWF
• Saiga Conservation Alliance